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Le chêne et l'olivier : rendez-vous chez Stark & Sons



Le chêne pour la force, l'olivier* pour la paix. Ce sont les symboles du corps préfectoral.


Aujourd'hui, j'ai accompagné mon mari chez Stark & Sons, au 16 rue de la Paix, pour assister à l'avant-dernière séance d'essayage de son premier uniforme.

L'occasion de plonger dans un univers feutré et élégant.


Le salon d'essayage est situé au premier étage de l'immeuble et l'on est tout de suite transporté dans une ambiance désuète à souhait.

Le magnifique parquet, les meubles Empire gainés de maroquin vert, les étagères dévoilant les échantillons d'étoffes, le lourd rideau de velours de la cabine d'essayage, ou encore le mètre de couture savamment déroulé sur la console, tout est fait pour créer un air de "négligé" d'un chic fou.



La maison Stark & Sons a été créée en 1910, lorsque M. Stark a quitté son Angleterre natale, où il habillait le Prince de Galles, pour s'installer à Paris, par amour pour une Française. Trois générations se sont succédées avant que la maison ne soit reprise en 2014 par une autre famille de tailleurs parisiens, Camps de Luca.

C'est le Général de Gaulle qui a décidé de faire confectionner les uniformes des membres du corps préfectoral par cette maison prestigieuse.

Elle n'a cependant pas le monopole de la fabrication. L’École Militaire ou d'autres tailleurs comme Balsan à Paris peuvent réaliser les uniformes.



Chaque préfet ou sous-préfet a droit à un uniforme tous les dix ans. Le premier est donc généralement coupé dans une étoffe chaude, pour parer le mieux aux différences de température, car l'on peut être nommé n'importe où en France et le changement de poste s'effectue environ tous les deux ans.

Pour l'Outre-mer, l'uniforme est blanc, et les préfets et sous-préfets se contentent souvent de porter les épaulettes à même leur chemise, sauf en cas de visite très officielle. Celles-ci se détachent grâce à un système judicieux d'agrafes.

Le Ministère de l'Intérieur prend également en charge la casquette, mais les gants, la cravate, la cape (magnifique !) ou le pardessus sont à la charge du haut-fonctionnaire.


Le travail de passementerie est très impressionnant : les feuilles de chêne et d'olivier réalisées en cannetille d'or ornent la casquette, les épaulettes et les parements (l'extrémité des manches) en brodure simple pour les sous-préfets et double pour les préfets.


On retrouve ces motifs sur les boutons dorés qui ferment la veste et la cape, et sur la bande cousue sur la couture du pantalon (en camaïeux noir).

Les ateliers sont situés juste au-dessus du salon d'essayage et j'ai eu le plaisir de pouvoir les visiter. C'est un rêve pour une amoureuse des patrimoines vivants ! La boîte à boutons revêt à elle seule des allures de coffre au trésor. Par discrétion pour la clientèle et respect des employés, je n'ai pas fait de photographies générales des ateliers, mais j'espère que mes quelques photographies de détail rendront un peu de cette ambiance "old school".


Plus d'une dizaine de couturiers et de couturières s'affairent dans une ambiance calme et studieuse, où chacun a bien conscience de posséder une part des secrets des savoir-faire français.



Car c'est le coeur du sujet. Les représentants de la République et de l’État sont aussi les ambassadeurs de ce qui se fait de mieux en France. Et ce depuis une longue tradition, rappelez-vous mon premier billet sur les robes de Joséphine à la Malmaison.

La réalisation d'un uniforme de préfet demande environ trois-cents heures de broderie et l'on ne peut qu'être humble devant le déploiement d'une telle énergie ! Le savoir-faire français se met au service de la représentation des plus hautes fonctions de l’État et inversement.


Cela m'a fait penser à la Manufacture des Gobelins et au Mobilier National, qui sont situés tout près de chez moi et où j'ai eu la chance d'effectuer un stage durant l'été 2011.

Les ateliers de haute-lisse et de basse-lisse, ainsi que ceux de la Savonnerie fonctionnent toujours aujourd'hui pour créer des tapisseries et tapis qui servent à orner les palais de la République ou qui sont offerts comme cadeaux diplomatiques. Les ateliers de création de meubles contemporains et ceux de restauration des objets d'art anciens servent également de laboratoire et de conservatoire des savoir-faire des métiers d'art.


Si l'on entend souvent des critiques sur les dépenses somptuaires de notre République, il faut comprendre que l’État français est aussi l'un des gardiens de ces patrimoines vivants, qui tendraient à disparaître dans une logique économique purement libérale.


Stark & Sons reste une entreprise privée qui ne confectionne pas que les uniformes du corps préfectoral. Ils réalisent également les habits des académiciens, et leurs costumes de ville et cravates habillent les élégants de ce monde.



Pour aller plus loin :

Le site internet de Stark & Sons : http://www.starkandsons.com/

Le site internet du Mobilier National (je vous conseille vivement la visite guidée des manufactures) :


*

Le blog "le chêne et le laurier" tenu par Monsieur Jérôme Cornieux, un passionné des uniformes du corps préfectoral :

Il a eu la gentillesse de m'éclairer au sujet des symboles des feuilles de chêne et d'olivier-laurier. Voici son explication :

"Dans les textes de création du Corps Préfectoral, en avril 1800, on parle bien de feuilles de laurier et de chêne. Le laurier représente la victoire et le génie... Symbolique parfaitement en rapport avec le Corps sous tout le 19eme siècle, mais en 1963 (décret du 01/10/1963) on parle maintenant de feuille d'olivier, moins belliqueux que le laurier, il est lui au contraire, symbole de paix et de diplomatie, plus adapté après la seconde moitié du XXème siècle."



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